Psychopompes,
2025
Je ne me laisserais pas empoisonner par ces mots.
Je me les approprierais, je les décortiquerais pour voir ce qu’il y a de bon à garder, séparer ce qu’il y a jeter.
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Du reste j’en tirerais de l’huile pour les lampes de mon temple.
Je n’ai plus honte de me repaître de restes. Je n’ai jamais vraiment eu le choix. Aux premiers servis qui feignent le rebutement à ma vue j’apprends à leur laisser mon indifférence. Car peu à peu je sais où creuser pour mieux ressurgir par derrière. Mon envol est lent mais calculé. Il me sera donné de leur rire au visage quand je les aurais mordu au cou.
Au fond, nous sommes une multitude à creuser, élaborer des chemins sinueux par lesquels nous glisser (en secret). À nous murmurer la marche à suivre dans le labyrinthe sybillin.
L’oeil ouvert est capable de voir dans le noir.
Nous sommes une multitude à élever des sanctuaires où rien ne barre la vue du soleil. Où le silence, le murmure du vent, le ruissellement de l’eau savent aimer, soigner, guérir. Il existe une indicible peuplade parmi laquelle se tenir.
Il existe des mots capables de panser. Il y a des gestes à acquérir ou retrouver. Je n’ai plus honte de me repaître de restes. Je sais comment tirer ma force du putréfié. Je n’ai pas peur de me nourrir de mes propres chairs pour subsister. Je sais où enterrer mes os pour mieux me recomposer.
Du reste j’en tire de l’huile pour les lampes de mon temple.